C’est un problème récurrent pour les CSE. Les élus reçoivent des plaintes en quantité, en revanche, lorsqu’ils demandent aux salariés s’ils sont prêts à témoigner, ceux-ci disparaissent presqu’aussi vite qu’ils sont venus. Une crainte d’écrire qui complique sensiblement la tâche du comité. Heureusement, la Cour de cassation a rappelé que les témoignages pouvaient être anonymisés sans perdre de leur valeur.
C’est un véritable sujet : que ce soit pour soi-même ou pour appuyer d’autres salariés, peu sont les collègues prêts à mettre noir sur blanc un témoignage. Crainte des représailles, de l’ostracisation, d’une plainte en dénonciation calomnieuse, ou tout simplement volonté de rester neutre dans les conflits, nombreuses sont les raisons de prendre du recul lorsque l’on est sollicité pour témoigner.
Le constat devient un problème lorsque le CSE a justement besoin de preuves pour appuyer une de ses actions. Dans l’affaire jugée par la Cour de cassation, le contentieux concernait un droit d’alerte pour risque grave, mais le comité ou un syndicat peuvent également avoir besoin d’attestation pour initier une enquête pour harcèlement, une alerte liée à des risques psychosociaux, une action contre une inégalité de traitement…
Pour contourner la difficulté, certains choisissent de produire des témoignages anonymisés, prêtant ainsi le flanc à une défense simple mais efficace de l’employeur : de telles attestations sont nécessairement sans valeur, je ne peux me défendre face à des personnes que je ne connais pas.
C’est face à ce dilemme juridique qu’intervient le principe d’actualité de « droit au procès équitableTM ».
Le droit au procès équitable implique que toute partie puisse produire des preuves lors d’un litige. Surtout, il nécessite que le juge prenne en compte la difficulté à obtenir ces preuves. C’est sur ce fondement que la Cour de cassation a récemment autorisé la production en justice de preuves obtenues de manière déloyale.
Concernant les témoignages anonymes, le raisonnement de la Cour de cassation se fait en deux temps :
Concrètement, un témoignage authentifié demeure la preuve reine, le CSE peut prendre en compte cette jurisprudence au moment d’élaborer sa stratégie.
Ainsi, lorsqu’aucun salarié ne veut témoigner à visage découvert, le CSE peut leur proposer de rédiger des témoignages non signés, ou comprenant une version anonyme. Pour que ces témoignages aient une valeur en justice, il faudra produire d’autres éléments, permettant de rendre l’ensemble de preuves crédible. Ce peut être des témoignages signés, ou tout autre élément permettant de mettre en perspective les attestations mystères (type rapport du médecin du travail, de la DREETS, emails, enregistrements…).
Le CSE ne doit ainsi pas hésiter à s’appuyer sur des salariés préférant que leur voix reste anonyme.
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 avril 2023, n°21-20.308
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