Komitê
Nous contacter
Tel : 01 87 66 96 92

Parce qu’un CSE informé en vaut deux, inscrivez-vous à notre lettre d’information ! (Rédigée par nos avocats, pour vous)

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription est confirmée.

Le retour du retour du préjudice nécessaire

Au cours d’une de leurs réunions secrètes dans les sombres souterrains situés sous la Cour de cassation, les magistrats de la chambre sociale se sont longuement demandé quel était le moyen le plus sûr pour irriter de nouveau le patronat après l’affaire des congés payés. Après une longue réflexion, nos alchimistes du droit décidèrent de ressusciter une fois encore le concept de « préjudice nécessaire ».

Un concept polémique (pour certains)

La notion de préjudice nécessaire a donné de l’urticaire a plus d’un avocat défendant les employeurs. Le principe est, il est vrai, en opposition avec les règles élémentaires issues du droit civil. En matière de responsabilité, l’indemnisation d’une victime dépend de la conjonction de trois éléments : une faute (ou une négligence fautive), un préjudice, et un lien de causalité les réunissant. Une erreur ou une faute ne permettent ainsi pas forcément d’engager la responsabilité de leur auteur si elles n’ont causé de tort à personne. Peut-être que, en effet, vous avez mal fixé un pot de fleur à votre balcon. Mais s’il n’a touché personne en tombant ni causé de dégât, personne ne pourra prétendre à une indemnisation. Avec le concept de préjudice nécessaire, votre voisin du dessous pourrait malgré tout vous demander des comptes.

En matière de droit du travail, le principe suscitait quelques tensions, car il permettait aux salariés de demander automatiquement réparation lorsque l’employeur manquait à certaines règles. Le cas érigé en emblème par certains était celui de la visite médicale d’embauche (aujourd’hui visite d’information et de prévention). Il était en effet parfois difficile de justifier qu’un salarié du tertiaire en pleine forme et n’ayant jamais souffert de problèmes de santé puisse obtenir une indemnisation en raison du seul oubli de son employeur d’organiser un rendez-vous de cinq minutes avec un médecin du travail surchargé.

La Cour de cassation, loin de l’affreux repaires de gauchistes parfois décrit, fut sensible à l’argumentation, en établissant dans un arrêt de 2016 qu’il appartenait aux salariés de démonter lors d’une action en justice que les manquements de l’employeur à la réglementation leur avaient causé un préjudice. Peut-être que tout n’avait pas été fait dans les règles, mais tant qu’il n y pas mort d’homme, il n’y a pas de raison de se plaindre.

Pour certains, cette décision marquait le clap de fin du préjudice nécessaire, il allait falloir prouver par A + B que vous méritiez la réparation que vous demandiez. C’était oublier que souvent Cour de cassation varie, et que la jurisprudence est chose mouvante.

Le préjudice nécessaire : Bouh !

L’employeur : Aaargh !! Il est de retour !

En 2022, la Cour de cassation a semblé considéré que le concept n’était en réalité pas si délirant. Dans un arrêt du 26 janvier 2022, elle a ainsi jugé qu’un salarié dépassant la durée hebdomadaire de travail subissait nécessairement un préjudice. Il n’avait pas à démontrer de manière scientifique l’impact de ses horaires prolongés sur son état physique pour obtenir une indemnisation.

Dans deux arrêts du 4 septembre 2024, la Cour a allongé la liste des situations constituant un préjudice nécessaire. Sont ainsi visés :

  • Le non-respect de la pause quotidienne ; 
  • Le travail d’un salarié au cours d’un arrêt maladie ; 
  • Le travail d’une salariée au cours d’un congé maternité ;

Les manquements à ces règles ouvrent droit automatiquement à réparation, sans qu’il ne soit nécessaire de démontrer leurs conséquences néfastes pour les salariés.

Pourquoi existe-t-il des préjudices nécessaires et d’autres non-nécessaires ?

Que le MEDEF se rassure, la Cour de cassation n’a pas non plus généralisé le principe de préjudice nécessaire. Le simple manquement à une règle du Code du travail ne permet ainsi pas d’enclencher la machine à sous, tout dépend du type de manquement. Dans ses décisions du 4 septembre, la Cour a notamment jugé que l’absence de visite médicale après un congé maternité ne cause pas nécessairement un préjudice à la salariée concernée.

GESTION-DES-CONFLITS-couleur-JPG-mini.jpgQui est un affreux gauchiste ?

Pourquoi y a-t-il donc des préjudices existant nécessairement, et d’autres situations où il faut prouver son préjudice ?

Sur le plan très juridique, tout semble dépendre de la nature du droit qui n’est pas respecté par l’employeur. Le droit à la pause, aux durées maximales, au repos durant un arrêt maladie ou un congé maternité, sont des droits fondamentaux, protégés aux niveaux nationaux et européens, et destinés à garantier la sécurité des travailleurs. Le seul fait de ne pas en bénéficier cause donc un préjudice au salarié. Ce n’est pas le cas pour le suivi médical, pour lequel il n’existe pas de droit inaliénable selon la Cour de cassation.

De manière plus concrète, on peut raisonner au regard de l’objet des règles qui n’ont pas été respectées. Les temps de pause, les durées maximales, les arrêts de travail et les congés maternités ont été établis pour offrir un repos nécessaire aux salariés. Le fait de ne pas les respecter a forcément pour conséquence d’amener un salarié à ne pas bénéficier de ce repos suffisant, et donc de lui causer un préjudice.

Sur le plan pratique, ces décisions sont salutaires en ce qu'elles vont faciliter les réclamations des salariés. On imagine sinon la difficulté à démontrer un impact sur la santé, puis à le relier avec exactitude à un manquement précis. Les salariés devraient, à partir d’expertises médicales et d’avis savants, prouver un problème de santé, et montrer que sa cause probable est liée à ses cadences de travail. L'employeur pourrait à loisir semer le doute en invoquant les multiples autres origines potentielles des troubles dont est victime son ex-employé.

L’oubli d’une visite médicale causerait, quant à lui, un préjudice si elle avait permis de déceler une pathologie ou un problème de santé survenu ultérieurement. Un salarié déclaré inapte et n’ayant jamais passé sa visite serait davantage fondé à le reprocher à son employeur.

Comment les conseils de prud’hommes évaluent-ils un préjudice nécessaire ? La fameuse méthode de la louche ! Chacun à sa technique : nombre de mois de salaires, somme forfaitaire… Tout dépend généralement du nombre de manquements, de leur nature, de leur durée… Cela peut aller de 500 euros à parfois 10 000 ou 20 000 euros dans les cas les plus graves.

Ordre du jour de la prochaine réunion occulte : si on reparlait du barème Macron ?

Retour

Envie d’en savoir plus ou juste de bavarder un peu ?

Vous pouvez nous joindre au 01 87 66 96 92
sur notre adresse email contact@komite-avocats.fr
ou en remplissant le formulaire ci-dessous

Ce champ est invalide
Ce champ est invalide
Ce champ est invalide
Ce champ est invalide
Ce champ est invalide