Hasard du calendrier, l’URSSAF avait mis en ligne son guide à destination des CSE peu de temps avant la publication de l’arrêt dans lequel la Cour de cassation donnait son avis (assez tranché) sur les conditions d’ancienneté pour l’accès aux ASC. Quelques jours après sa sortie, le guide était déjà obsolète, suscitant doutes et interrogations sur le terrain concernant l’attitude à adopter. Les rédacteurs de l’URSSAF ont heureusement profité de l’été pour le mettre à jour. Peu de suspens, les conditions d’ancienneté sont bel et bien illicites selon l’Administration !
L'arrêt du 3 avril 2024 fait partie de ceux qui ont du bruit, tant ses implications et conséquences pratiques étaient grandes pour les élus et les CSE. Même sans le savoir, vous en avez sûrement entendu parler.
Pour resituer rapidement le débat, nombreux étaient les CSE à instaurer une condition d’ancienneté minimale pour bénéficier des œuvres sociales. Les raisons étaient multiples, entre nécessité de contrôler les budget, limiter les effets d’aubaines pour les salariés de passage, instaurer une équité entre salariés…
La Cour d’appel de Paris semblait avoir validé la pratique, en autorisant la fixation d’une condition d’ancienneté de six mois.
L’URSSAF s’était alignée, et avait indiqué dans son guide pratique à destination des CSE que ceux-ci pouvaient mettre en place une telle condition. L’autorisation du bras armé de la Sécu était essentielle car, pour qui l’ignore, le principal risque pour les comités lors de la mise en place des ASC est celui du redressement. En effet, les sommes et prestations que le CSE distribue le sont à l’occasion du travail, et devraient en principe être assujetties à cotisations sociales. L’URSSAF accepte d’exonérer ces prestations, à condition que les élus respectent certaines conditions strictes. On parle de tolérance administrative.
Parmi ces conditions figurent une intediction des discrimination dans la distribution des œuvres sociales et une obligation d’égalité entre les salariés, aucun critère lié à des considérations professionnelles ne pouvant être appliqué. La question de l’ancienneté faisait figure d’exception, enfin, jusqu’au 3 avril dernier.
On imagine qu’à la vue de l’arrêt du 3 avril 2024 (les références de l’arrêt qui a fait couler beaucoup d’encre : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 3 avril 2024, 22-16.812), les chargés de communication de l’URSSAF ont dû avoir des sentiments peu amènes pour les juges. La Cour de cassation y a en effet jugé que les conditions d’ancienneté étaient illicites. Beaucoup d'élus (et d'avocats qui les conseillent) se sont également trouvés fort dépourvus, tant les conditions d'ancienneté s'étaient généralisées.
Potentiellement, tous les salariés peuvent réclamer les prestations du CSE dès leur premier jour de travail. Surtout, le dommage collatéral de cette nouvelle position est que les conditions d’ancienneté sont considérées comme discriminatoires, et peuvent entrainer un redressement de l’URSSAF, alors qu’elles étaient tolérées quelques semaines auparavant.
L’URSSAF n’ayant pas actualisé sa page internet et son guide, une incertitude demeurait sur sa position sur le sujet. Profitant de la trêve estivale, le site de l’URSSAF s’est mis à jour.
Dire qu'on vient de commander les chèques cadeaux...
Dans une publication publiée le 30 juillet, l’URSSAF rappelle qu’elle admettait que le CSE puisse fixer une condition d’ancienneté pour l’attribution des prestations (dans la limite de 6 mois) sans que cela ne remette en cause l’exonération de cotisations et contributions sociales, mais qu’un arrêt de la Cour de cassation interdit désormais cette possibilité.
Le Guide à destination des CSE précise donc que les conditions d’ancienneté sont désormais interdites. Fixer une telle condition risque d’entrainer l’assujettissement des prestations du CSE à cotisations sociales et un redressement (pour avoir une idée de la facture, multipliez le montant de vos chèques cadeaux par 2,5…).
Cependant, faisant preuve de compréhension, l’URSSAF accorde un délai aux CSE pour se mettre en conformité. Ceux-ci on jusqu’au 31 décembre 2025 pour modifier les critères de versement de leurs prestations et se mettre en conformité. Grand seigneur, l’URSSAF indique qu’en cas de contrôle et si une condition d’ancienneté est constatée pour le bénéfice des prestations du CSE, il sera demandé au comité de se mettre en conformité pour l’avenir.
Les élus peuvent être confrontés à deux situations situations :
Lorsqu’une condition d’ancienneté est déjà fixée, que ce soit dans leur règlement intérieur, leur règlement des ASC, ou tout autre document à portée générale organisation les œuvres sociales, ils doivent la modifier avant le 31 décembre 2025.
Pour les nouvelles activités mises en place, ou lorsqu’aucune règle générale n’est fixée, les CSE ne peuvent plus instaurer de conditions d’ancienneté, le délai ne valant que pour les règles établies avant la publication de l’URSSAF.
Il est conseillé tout de même de supprimer les conditions d’ancienneté dès que possible. Outre que les salariés ne sont pas liés par la position de l’URSSAF et peuvent agir dès à présent contre le CSE, on n’est jamais à l’abri d’une erreur lors d’un contrôle.
Quelques idées pour les CSE cherchant un paliatif : ici
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